Je suis arrivé en 1996 à la Fauconnière à Gonesse. Depuis 1997, j’ai commencé à essayer de prendre les jeunes en main pour de leur donner de quoi s’occuper.

Ce travail que je fais avec les jeunes, je l’ai commencé depuis Sarcelles où je vivais avant. Ici, j’ai vu des jeunes comme là-bas, livrés à eux mêmes, dehors, à traîner. Je me suis occupé de certains qui sont devenus aujourd’hui des grands frères et maintenant, je m’occupe de leurs petits frères. Je m’étais dit que si personne ne s’occupe de ces jeunes là, c’est d’autres qui vont le faire pour les amener dans de mauvaises choses comme la vente de drogues ou autres choses.

Pourquoi je fais ça ? Nous, avant, quand on faisait des bêtises ou qu’on partait pas à l’école, on avait toujours un grand frère pour nous arrêter, pour nous dire de retourner à l’école, qui nous tapait même des fois dessus pour nous faire aller droit. Quand on partait vers l’obscurité, ils nous disaient :

– Non, ce n’est pas le bon chemin ! Revenez vers là. Ne négligez pas l’école. Ne suivez pas nos traces.

Je me rends compte aujourd’hui, que ce genre de choses sont perdues Aujourd’hui, c’est fini. Il n’y a plus rien pour guider ces gamins vers le bien. Il n’y a plus que ceux qui ont pris de mauvais chemins qui entraînent les petits dans leurs traces.

Aujourd’hui, un gamin ne va pas à l’école personne ne lui demande rien et il peut traîner toute la journée à l’extérieur sans que personne ne s’inquiète. C’est pour ça que je me suis dis :

– Pourquoi ne pas faire pour ces jeunes ce que l’on a fait pour nous ? Pourquoi ne pas prendre le temps pour ces jeunes pour les diriger vers la lumière ?

Il faut pouvoir leur donner autre chose sinon ça va s’aggraver encore plus, de plus en plus. Ce qu’il faut ce n’est pas plus de policiers mais plus de gens à travailler dans les quartiers, à savoir parler aux jeunes. Ces gens là doivent avoir vécu ici, il faut savoir aborder ces jeunes et les policiers ne savent pas. Eux, c’est direct dans l’agression. Ils ne viennent pas pour dialoguer. Des fois, je les vois intervenir devant le centre. Ils ne discutent pas, c’est :

– Lève-toi ! Colle toi au mur !

Et ils palpent, ils fouillent. Non, il faudrait qu’ils fassent leur travail plus tranquillement. Certains sont bien mais beaucoup d’autres cherchent. Ils salissent ce qu’ils représentent.

C’est un travail qui demande des mois, une approche plus tranquille en faisant des activités, des rencontres. Tout doucement, une confiance peu s’installer.

Cœur musical, c’est le nom de notre association. On ne savait pas quel nom donner au début. On cherchait, on cherchait. On s’est dit que beaucoup de jeunes n’ont pas assez de tripes, assez de cœur pour donner aux autres. On discutait, on se disait qu’ils ont le cœur dur, qu’ils ont la haine, qu’ils sont perdus dans la violence. On s’est dit pourquoi ne pas changer ça, d’enlever cette haine et de mettre de l’amour, que cet amour passera et se fera par la musique. C’est là qu’est né le nom Cœur musical. Par rapport à toute cette violence, il faut que l’amour revienne dans les cœurs et par la musique qui apaise les cœurs.

F, 43 ans.