Une année, on a été à Théoul, au centre CCAS. C’était la première année ou ce centre ouvrait pour les actifs, normalement, c’était que pour les inactifs.

On est arrivé, on était les seuls actifs. Une personne charmante d’un certain âge nous indique une table pour le repas. Le lendemain, pour le petit déjeuner, avec ma femme on s’est installé à une autre table.

Là, d’un seul coup, un vieux me dit:

– Non ! Vous asseyez pas ici. Vous avez changé de place. Vous avez mangé là-bas hier soir. Votre place, c’est là-bas. Vous avez rien à faire ici.

Je lui dis:

Calme ! Cool ! Zen !

Là-dessus, on retourne à notre place, on voulait pas foutre la merde.

Le premier soir, on avait eu de la soupe. Le deuxième soir, soupe, même pas potage, soupe. Troisième soir, soupe. Rien d’autre en entrée.

Là, ça va plus. Je suis allé voir le chef de camp, je lui ai dit qu’on était actif et que la soupe en plein été, on en mangeait rarement. En plus, c’était la région et la saison des tomates et des melons, que j’étais pas venu pour manger de la soupe. Le soir même, avec ma femme, on a eu droit à deux belles assiettes de tomates en salade. Tous les autres, ils avaient de la soupe.

Là, ils nous ont regardés avec des yeux plein d’envie.

Alors, à force de mettre mon bazar, on a réussi à avoir des hors-d’œuvre et des desserts au choix et le soir plus de soupe, sauf pour ceux qu’en voulaient vraiment.

Après, j’ai été accepté, pas comme un dieu, mais comme un bienfaiteur de l’humanité parce qu’ils en avaient marre d’avoir de la soupe mais qu’ils osaient rien dire.

Le premier soir, je m’étais fait engueulé, après, au bout d’une semaine, on buvait l’apéro, on jouait à la pétanque. Eux, ils étaient heureux d’être sorti de leur soupe et de leurs desserts qui valaient pas un clou.

Au Portugal, il y a eu la révolution des œillets, moi, à Théoul, j’ai fait la révolution des tomates.