Les moments forts, les moments précis que j’ai vécu avec Marcel Paul, ça a été toujours dans des grèves, dans des luttes.
C’était très dur de travailler avec Marcel Paul, c’était un homme infatigable qui pouvait travailler vingt heures par jour. Cette force de travail venait de l’homme, de sa volonté de tout vaincre, de sa volonté de mettre le plus possible d’énergie au service du peuple.
Il n’y avait pas que Marcel Paul, il y avait tous un tas de militants d’une capacité de travail impressionnante qui ont fait le statut et les œuvres sociales. Au départ, il n’y avait rien du tout, il a fallu tout créer, tout imaginer.
Marcel Paul, c’était un homme qui se pointait n’importe où, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit pour voir les gars sur le terrain et parler avec eux. C’est un homme quand il était ministre qui passait la nuit dans les usines à gaz, il cassait la croûte avec les chauffeurs de four en haillons. C’est là, où se trouvaient les vrais prolos. La force vive de la lutte était dans les usines et dans les centrales.
C’est là, où je l’ai rencontré pour la première fois en 1947 à l’usine du Landy. J’avais dix huit ans et j’étais aux fours. On était tellement dégueulasse, tellement noir par le charbon qu’on voyait que les dents et les yeux. Et il casse croûtait avec nous, et il nous parlait.
Il avait cette petite voix fluette, on aurait dit une voix de femme ou de garçonnet. On était toujours très étonné de l’entendre parler. Mais il avait une voix d’une portée exceptionnelle.
Marcel Paul parlait simplement, toujours de façon très ferme, très déterminé. Il savait transmettre l’envie de se battre, l’envie de ne pas céder à rien du tout, de ne jamais plier, ne jamais trahir.
La chose qu’il nous disait le plus souvent c’était :
– Les gars faire le statut national ça a pas été le plus difficile avec l’aide que j’ai reçu des copains. Mais ce sera plus difficile de le conserver.
Il avait ce statut en tête, c’était la prunelle de ses yeux, le statut national. Pourquoi ?
Il disait :
– C’est la première fois que la classe ouvrière a un point sur lequel s’appuyer.
Faisons ça pour tous les travailleurs et Ce serait Le Paradis pour eux.
Je suis fier de mon passé, je suis fier d’avoir côtoyé ces hommes et d’avoir hérité un peu de leur courage et de leur volonté.